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VOYAGE
A
L'ILE-DE-FRANCE ;

PAR
BERNARDIN DE SAINT-PIERRE.

TOME SECOND.

Paris.
A. HIARD, LIBRAIRE-ÉDITEUR,
RUE SAINT-JACQUES, N. 131.

1835.

IMPRIMERIE DE MOQUET ET Cie,
rue de la Harpe, n. 90.

VOYAGE
A L'ILE-DE-FRANCE.

LETTRE XX.
DÉPART DE BOURBON. ARRIVÉE AU CAP.

Nous sortîmes à dix heures du soir de la baiede Saint-Paul. La mer y est plus calme, et lemouillage plus sûr qu'à Saint-Denis, dont la radeest gâtée par une quantité prodigieuse d'ancresabandonnées par les vaisseaux. Leurs câbles s'ycoupent fort promptement ; cependant les marinspréfèrent Saint-Denis.

Dans un coup de vent du large on ne peut sortirde la baie de Saint-Paul ; et si un vaisseauétait jeté en côte, tout l'équipage périrait, lamer brisant sur un sable fort élevé.

Le 23, nous perdîmes Bourbon de vue. Lesservices que nous avions reçus de monsieur et mademoisellede Crémon pendant notre séjour, lesvents favorables, une bonne table, et la sociétéd'un capitaine très-honnête, M. de Rosbos, nousdisposaient au plaisir de retrouver l'Indien.

Nous plaignions les passagers de ce vaisseau,qui avaient eu à éprouver le mauvais temps et ladisette de vivres.

On compte neuf cents lieues de Bourbon auCap. Le 6 janvier 1771, nous vîmes le matin lapointe de Natal, à dix lieues devant nous. Nouscomptions dans trois jours être à bord de l'Indien.Nous avions eu jusqu'à ce jour vent arrière.Il fit calme le soir, et une chaleur étouffante.A minuit le ciel était très-enflammé d'éclairs,et l'horizon couvert partout de grandsnuages redoublés. La mer étincelait de poissonsqui s'agitaient autour du vaisseau.

A trois heures de nuit, le vent contraire s'élevade l'ouest avec tant de violence, qu'il nous obligeade mettre à la cape sous la misaine. La tempêtejeta à bord un petit oiseau semblable à unemésange. L'arrivée des oiseaux de terre sur lesvaisseaux est toujours signe d'un très-mauvaistemps, car c'est une preuve que le foyer de latempête est fort avant dans les terres.

Le troisième jour du coup de vent, nous nousaperçûmes que notre mât de misaine avait faitun effort à quatre pieds au-dessus du gaillard ;on serra la voile, on relia le mât de cordages etde pièces de bois, et nous tînmes la cape sous lagrande voile.

La mer était monstrueuse et nous cachait l'horizon.On fut fort surpris de voir, à une portéede canon, un vaisseau hollandais manœuvrantcomme nous : il fut impossible de lui parler. Lecinquième jour, le vent s'apaisa. On examina notremât de misaine, qui se trouva absolumentrompu. Cet accident nous fit redoubler de vœuxpour l'arrivée au Cap.

Le gros temps nous avait fait perdre du chemin,suivant l'ordinaire ; il succéda du calme,qui nous fit perdre du temps.

Le 12, nous retrouvâmes le vaisseau hollandais,et nous lui parlâmes. Il eut la précautionde ne se laisser approcher que ses mèches alluméeset ses canons détapés : il venait de Batavia ; il allaitau Cap.

Enfin, le 16 janvier, nous eûmes l'après-midila vue du Cap, à tribord. Nous louvoyâmes toutela nuit. Le 17 au matin, il s'éleva une brise très-violente ;le ciel était couvert d'une brume épaissequi nous cachait absolument la terre. Nous allionsmanquer l'entrée de la baie, lorsque nous aperçûmespar notre travers, dans un éclairci, uncoin de la montagne de la Table ; alors nous serrâmesle vent, et vers mid

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