LIBRAIRIE BLANCHARD RUE RICHELIEU, 78 | ÉDITION J. HETZEL | LIBRAIRIE MARESCQ ET Cie 5, RUE DE PONT-DE-LODI |
Le Secrétaire intime est une fantaisie sans rime ni raison qui m'estvenue en 1833, après avoir relu les Contes fantastiques d'Hoffman.Cela manque d'ensemble et atteste une grande inexpérience littéraire. Lafable est-elle amusante? L'imagination, à défaut de la vraisemblance, ytrouve-t-elle son compte? Mon point de vue a tellement changé, que je nesuis plus un juge impartial des essais de ma jeunesse.
Nohant, 13 octobre 1853.
GEORGE SAND.
I., II., III., IV., V., VI., VII., VIII., IX., X., XI., XII., XIII., XIV., XV., XVI., XVII., XVIII., XIX., XX., XXI., XXII., XXIII., XXIV. |
Par une belle journée, cheminait sur la route de Lyon à Avignon un jeunehomme de bonne mine. Il se nommait Louis de Saint-Julien, et portait àbon droit le titre de comte, car il était d'une des meilleures famillesde sa province. Néanmoins il allait à pied avec un petit sac sur le dos;sa toilette était plus que modeste, et ses pieds enflaient d'heure enheure sous ses guêtres de cuir poudreux.
Ce jeune homme, élevé à la campagne par un bon et honnête curé, avaitbeaucoup de droiture, passablement d'esprit, et une instruction assezrecommandable pour espérer l'emploi de précepteur, desous-bibliothécaire ou de secrétaire intime. Il avait des qualités etmême des vertus. Il avait aussi des travers et même des défauts; mais iln'avait point de vices. Il était bon et romanesque, mais orgueilleux etcraintif, c'est-à-dire susceptible et méfiant, comme tous les gens sansexpérience de la vie et sans connaissance du monde.
Si ce rapide exposé de son caractère ne suffit point pour exciterl'intérêt du lecteur, peut-être la lectrice lui accordera-t-elle un peude bienveillance en apprenant que M. Louis de Saint-Julien avait detrès-beaux yeux, la main blanche, les dents bla