A ma vieille mère,
en témoignage de filiale et
respectueuse affection.
Depuis son retour d'Allemagne, l'auteur a reçude tous les coins du Canada et de plusieurs endroitsdes États-Unis d'innombrables invitations pour conférences,discours, etc.
A peu d'exceptions près, il lui a été impossiblenaturellement d'accéder au désir si chaleureusementexprimé de part et d'autre.
D'un autre côté un grand nombre de personnesdont il s'honore de l'amitié lui ont fortement conseilléde publier, sous une forme quelconque, quelquesmémoires et de son séjour en Belgique—c'est-à-diredepuis son mariage à Capellen, près d'Anvers, en1914, jusqu'à son arrestation en 1915—et de sa captivitéen Allemagne les années subséquentes.
C'est pour satisfaire au désir des uns et au conseildes autres qu'il offre au public la narration, écrite àla diable, qui suit.
Si l'on y cherchait de la philosophie, un effortlittéraire, des considérations d'ordre politique ousocial ou même des jérémiades... on serait déçu.
L'auteur n'a eu d'autre intention que celle derelater, sans efforts et sans prétention, des incidentset des événements, cocasses, indifférents ou tristesauxquels il a été mêlé; de faire voir superficiellementce qu'est la vie d'un prisonnier de guerre derrièredes murailles élevées sous la garde médiate ouimmédiate de Prussiens authentiques.
Là s'est borné son effort.
H. B.
Ce jour-là, une atmosphère de religiosité enveloppaitl'imposante chaîne de montagnes qui séparentl'Espagne de la France. Le Congrès Eucharistique,qui prenait fin, avait réuni, à Lourdes, un nombreuxclergé et un peuple immense venus de tous les coinsdu monde. Tous—fidèles par centaines de mille:laïques, prêtres, prélats, évêques, princes de l'Eglise—avaient, la veille au soir, mêlé leurs voix dans leschants pieux de l'inoubliable et grandiose processionaux flambeaux en face de la Basilique, pendant quelà-haut, au sommet du Pic du Gers, la croix flamboyantese détachait dans la nuit profonde. Cettecroix de feu, au fond de la nue, semblait rappeler laparole angélique d'il y a deux mille ans: Pax hominibusbonae voluntatis.
C'était le 26 juillet 1914, un dimanche. Nousnous promenions, ma femme et moi, dans le parcd'un village pyrénéen. Le soleil dardait ses rayonschauds et vivifiants, incendiant toute la vallée duGave. Soudain, un camelot s'approche de nousportant sous son bras un paquet de journaux.Le gamin criait à tue-tête:—"C'est la guerre!C'est la guerre!" Nous lui coupons la parole enposant cette question:
—Quelle guerre?...
—Mais la guerre entre l'Autriche et la Serbie,monsieur. Vous aurez tous les détails en achetantmon journal: la Liberté du Sud-Ouest.
En effet, ce matin-là, toute la presse européennepubliait le texte de l'ultimatum, désormais fameux,que l'Autriche venait de lancer à la petite Serbie.
Le lendemain, dans le rapide qui nous ra